Nous avons besoin de la satire politique comme mécanisme d’adaptation

Plus qu’un simple divertissement, Fringe est mon paradis – une évasion d’un mois au cours de laquelle je plonge dans le chaos de la vie, retrouve mon peuple et découvre l’inspiration dans les coins les plus inattendus.

Bien sûr, la scène politique peut être un peu décevante, mais pendant quatre semaines en août, les comédiens ont travaillé leur magie, transformant le Brexit, le débat sur l’indépendance et nos politiciens qui semblaient être sortis des jeux satiriques en blagues qui divisent.

Toute la saga politique britannique des sept dernières années se lit comme un scénario de comédie folle, tout droit sorti de The Thick of It. Les comédiens ont réussi à tisser l’humour du chaos de notre pays, transformant des adversités telles que la crise du coût de la vie, le NHS en difficulté et l’enfer du logement en rires partagés.

Ce n’est pas que nous trouvons ce problème drôle et les blagues ne nous donnent aucune solution. Mais l’humour est un outil de survie face à l’adversité. Et dans ces moments pleins de rires, le poids du monde semblait s’alléger.

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Au milieu d’une foule bourdonnante, je ne suis pas juste un autre visage – je fais partie d’un gang animé à la recherche de réconfort, d’unité et de rire au milieu de la folie. L’humoriste plonge dans les histoires quotidiennes de folie que nous connaissons tous, et soudain, nos différences semblent s’estomper, nous laissant tous unis dans le rire.

Alors que je m’asseyais sur ma chaise, je me rappelai que ce n’était pas seulement le rire qui nous réunissait ; c’est notre expérience partagée. Chaque punchline est tissée dans une couverture colorée de frustration, d’acceptation et de pure bêtise de la vie.

Une chose est sûre – l’ambiance de 2023 est bien loin de ma première expérience Fringe en 2014. Cette fois-ci, un thème dominant ne va pas disparaître – le déclin. Le sentiment que le Royaume-Uni était dans une spirale descendante, que le Royaume-Uni était au plus bas était de sa propre fabrication.

Le fait que ce thème apparaisse dans toutes les comédies que j’ai vues jusqu’à présent, et que les rires qu’il suscite chez le public ont un soupçon de désespoir – vous savez, le genre de rire qui crie « la politique a déchiré mon âme en morceaux . et rien ne peut le réparer »- cela m’a fait réaliser que ce sentiment s’est infiltré dans notre conscience collective.

C’est un endroit risqué pour la société, surtout dans les mois qui précèdent une élection, lorsque les gens commencent à douter qu’un avenir meilleur soit possible, lorsque les alternatives semblent rares et lorsqu’ils sentent qu’il n’y a pas de solutions claires et pratiques sur la table.

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C’est alors que nous nous tournons vers le rire comme médicament. Dans un monde où la négativité ressemble à une averse incessante, l’humour agit comme notre parapluie fidèle, nous protégeant de la morosité. Honnêtement, nous le supplions pratiquement.

Un aspect de la Grande-Bretagne que j’apprécie vraiment est la capacité à trouver de l’humour même dans les rebondissements politiques les plus bouleversants, et surtout quand il s’agit de se moquer des politiciens eux-mêmes.

Je crois que cette tendance est inestimable en temps de crise, car elle contribue au maintien de l’harmonie sociale. À mon avis, le déclin de la satire politique en France ces dernières années et la montée concomitante de colère et de frustration politiques ne sont, contrairement à tout ce dont j’ai été témoin auparavant, pas entièrement une coïncidence.

La perte que nous avons subie avec la disparition des Guignols de l’info, une émission satirique de marionnettes semblable à Spitting Image, a eu un impact profond. Je me souviens très bien avoir passé toute mon enfance à regarder cette émission tous les soirs et à regarder passionnément l’émission hebdomadaire le dimanche. C’était éclaboussant, a porté l’irrévérence à de nouveaux sommets et était extrêmement drôle dans sa représentation des politiciens.

La famille Le Pen est dépeinte comme des arbitres aux préjugés ; l’ancien premier ministre Lionel Jospin en politicien désabusé et exaspéré qui en a marre des électeurs ignorants ; l’ancien président Jacques Chirac est toujours apparu dans des tenues de super-héros et était surnommé Super Menteur – ces images sont encore gravées dans ma mémoire.

ET comment pourrais-je oublier Monsieur Sylvestre, la poupée qui ressemble au diabolique Sylvester Stallone avide d’argent, représente le capitalisme américain et rit quand il regarde des photos d’enfants affamés en Afrique ? Une grande partie de ma première éducation politique a été façonnée par la satire et j’aspirais à ce programme qui nous donnait l’occasion de ridiculiser ceux au pouvoir.

La dernière victime de la retraite satirique en France est l’émission quotidienne animée par la journaliste et comédienne belge Charline Vanhoenacker sur la radio publique France Inter.

Chaque jour, lui et son équipe de comédiens font la satire de la politique française à travers des sketches et des chansons, se confrontant parfois même aux politiciens qu’ils parodient en studio. Naturellement, l’émission et son style humoristique ont suscité la polémique, et peu avant la pause estivale, le président de la radio a annoncé sa décision de l’abandonner.

Dans un monde parfois chancelant, où l’état de la Grande-Bretagne et l’incertitude mondiale occupent une place importante, le rôle de la satire est plus important que jamais. Il ne s’agit pas seulement de bons rires, il s’agit de la façon dont nous naviguons dans les eaux tumultueuses des temps modernes.

La satire a une étrange capacité à prendre les aspects les plus absurdes de la réalité et à les mettre en lumière, en exposant leurs défauts et leurs contradictions. C’est comme un miroir reflétant la folie qui caractérise souvent notre paysage politique et social.

Et avouons-le – dans une année comme 2023, où les problèmes du monde semblent s’aggraver, nous avons désespérément besoin de cette réflexion.

C’est la beauté de la satire – elle a le pouvoir d’unir. Il forme un langage commun, un terrain d’entente sur lequel nous pouvons tous rire des absurdités et pleurer les défis.

Lorsque nous nous réunissons sur le Fringe ou sur d’autres plates-formes où la satire prospère, nous ne sommes pas seulement des individus, nous sommes une communauté, trouvant réconfort et force dans notre réponse collective au chaos. Au moins, nous sommes ensemble là-dedans.

Mais la satire ne se limite pas à souligner ses défauts. Il va au-delà de la surface pour encourager la réflexion et le changement.

Alors que nous rions des représentations incompétentes et des décisions confuses des politiciens, nous sommes également encouragés à réfléchir plus profondément aux systèmes qui permettent à de telles situations de se produire. La satire suscite la conversation, nous incitant à remettre en question, à remettre en question et, finalement, à exiger mieux.

À une époque où l’espoir semble rare, la satire offre une lueur d’optimisme. Cela nous rappelle que nous avons le pouvoir de rire face à l’adversité, de trouver un terrain d’entente au milieu de la division et de susciter le changement même dans les circonstances les plus difficiles. La satire n’est pas seulement un mécanisme d’adaptation – c’est un appel à l’action, un appel à voir les défauts et à s’efforcer de s’améliorer.

Charlotte Baudin

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