Une famille, cinq candidats : les dynasties règnent sur la Thaïlande rurale

Ils font partie d’un certain nombre de familles impliquées dans la politique thaïlandaise – la plus célèbre étant la famille Shinawatra, dont le patriarche Thaksin a été Premier ministre de 2001 à 2006 et qui n’a cessé de s’étendre depuis l’exil à l’étranger.

Le gain financier d’un mandat élu – un législateur gagne environ 3 500 dollars par mois – peut ne représenter qu’un peu plus de quelques centimes pour ces clans ultra-riches, mais l’influence qu’il apporte peut être énorme pour leurs intérêts commerciaux.

La famille Thienthong a construit sa fortune grâce à une entreprise de logistique prospère dans son cœur oriental – qui comprend le principal passage frontalier vers le Cambodge – et domine la politique de la région depuis les années 1970.

Avant le vote du 14 mai, leurs noms ont été placardés sur des affiches de campagne le long de routes de campagne accidentées dans la province rurale appauvrie de Sa Kaeo.

Kwanruen Thienthong, sa fille Treenuch et son neveu Sorawong se disputent les trois sièges de circonscription à gagner à Sa Kaeo.

Sorawong est candidate pour le Pheu Thai, le principal parti d’opposition en tête des sondages d’opinion, tandis que les deux femmes sont du parti Palang Pracharath (PPRP), soutenu par l’armée, qui dirige la coalition au pouvoir.

Les frères de Sorawong sont également candidats au Pheu Thai : Suchart dans la circonscription de Bangkok, et Surakiat, sur la liste du parti.

« La politique, c’est la politique. La famille, c’est la famille. Nous avons des points de vue différents en politique, mais nous restons une famille », a déclaré Sorawong à l’AFP.

Treenuch a commencé sa carrière de député avec le précurseur du parti Pheu Thai il y a plus de 20 ans, mais est passé au PPRP, a été réélu en 2019 et a été ministre de l’Éducation.

Pour les électeurs de Sa Kaeo, les antécédents familiaux dans le domaine sont plus importants que le nom du parti ou l’idéologie politique.

« Ils sont descendus dans tous les quartiers et quand il y avait du travail ou qu’il y avait une demande d’aide de la part de la population locale, ils ont aidé », a déclaré à l’AFP Treenuch Sirinthip Sawangkloi, un partisan lors d’un rassemblement bruyant.

Socle local

La campagne thaïlandaise est mêlée à l’influence de ces clans riches et puissants et une partie de leur soutien local repose sur l’intervention personnelle ainsi que politique.

« Quand mon cousin est mort, je leur ai demandé de s’occuper des funérailles et ils l’ont fait, donc je n’ai pas pu les laisser », a déclaré à l’AFP Boonma Noinamkhum, une autre sympathisante des Treenuch.

Pour les électeurs, ils peuvent offrir stabilité et influence locale dans un royaume à l’histoire politique mouvementée marquée par une dizaine de coups d’État depuis la fin de la monarchie absolue en 1932.

Pasuk Phongpaichit, économiste à l’Université Chulalongkorn de Bangkok, explique que cela s’est développé lors des bouleversements qui ont secoué la Thaïlande dans les années 1970 et 1980.

« Au cours de cette période (…), ils ont pu générer beaucoup d’argent et d’influence grâce à un système sans état de droit, et une relation symbiotique avec l’armée locale, la police locale et des bureaucrates influents », a déclaré Pasuk à l’AFP.

« Une fois qu’ils sont devenus riches, ils peuvent renforcer le pouvoir sur les députés locaux. Ils voient alors une opportunité d’entrer en politique. »

Mais le pouvoir politique n’a pas suffi à sauver Thaksin, l’ancien magnat des télécommunications qui a été évincé lors d’un coup d’État en 2006 et qui s’exile maintenant à l’étranger pour éviter les accusations de corruption qui, selon lui, sont politiquement motivées.

Malgré ce revers, Forbes évalue toujours sa richesse à plus de 2 milliards de dollars, bien que cela ne le place qu’au 14e rang sur la liste des riches Thaïlandais, loin derrière les frères Chearavanont qui possèdent le plus grand conglomérat de Thaïlande, CP Group.

Et l’influence de Shinawatra dans la politique thaïlandaise n’a pas diminué : la sœur de Thaksin, Yingluck, a été Premier ministre de 2011 à 2014 et sa fille est l’une des candidates Pheu Thai pour le poste cette fois.

dureté

Pendant près de 50 ans, à l’Assemblée nationale et au cabinet, Thienthong a fait partie du paysage politique thaïlandais et dans les années 1990, ils avaient la réputation de faire ou défaire le gouvernement.

En plus des cinq candidats de cette année, le frère de Treenuch, Thanit, a été élu cinq fois au parlement, battant plus récemment un autre Thienthong, Sonthidej.

Mais après les manifestations de rue menées par des jeunes appelant à un changement politique en 2020, les prochaines élections pourraient marquer un tournant pour ces clans, a déclaré Pasuk.

«Cette élection a deux systèmes. Qui sont dominés par des familles politiques, et une nouvelle génération de jeunes électeurs plus susceptibles de trouver plus attractifs des partis aux idéologies et aux programmes à long terme. Lequel gagnera cette fois ? Très incertain », a-t-il déclaré à l’AFP.

Pourtant, ces dynasties ont fait preuve d’une résilience et d’une capacité d’adaptation remarquables pour survivre au monde politique chaotique de la Thaïlande.

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