La justice française refuse d’extrader l’ancien militant italien

PARIS (AP) – La plus haute juridiction de France a décidé mardi de ne pas extrader 10 anciens militants de gauche reconnus coupables d’attentats perpétrés en Italie dans les années 1970 et 1980.

Les deux femmes et les huit hommes ont fui l’Italie après leur condamnation et avant de pouvoir être envoyés en prison. Désormais âgés de 62 à 79 ans, ils vivent librement en France depuis des décennies.

Leurs crimes comprenaient le meurtre d’un général paramilitaire des carabiniers et l’enlèvement d’un juge, tous deux en 1980.

Un tribunal de Paris a également rejeté leur extradition, et la décision a été portée en appel l’année dernière. Mais la décision de mardi de la Cour de cassation est le verdict judiciaire français définitif sur cette affaire qui dure depuis des décennies.

Le ministre italien de la Justice, Carlo Nordio, a déclaré que l’Italie « avait tout fait en son pouvoir » pour lever les obstacles politiques qui ont guidé les politiques françaises permettant aux militants de vivre librement en France, et a pris note de la décision finale du tribunal.

Dans un communiqué diffusé par l’agence de presse LaPresse, Nordio a salué les efforts de son homologue français, Eric Dupond-Moretti, pour répondre à la demande de justice de l’Italie.

La résistance des autorités françaises à l’emprisonnement des Italiens est depuis longtemps une question épineuse entre Paris et Rome.

Au fil des ans, l’Italie a demandé l’extradition d’environ 200 anciens militants condamnés qui se trouveraient en France.

Dans le cadre de la politique des années 1980 connue sous le nom de «doctrine Mitterrand», du nom du président socialiste de l’époque, François Mitterrand, la France a refusé d’extrader des militants italiens de gauche à moins qu’il n’y ait des preuves qu’ils avaient commis des «crimes de sang».

Les responsables italiens ont contesté les critères comme étant trop vagues et affirment que la doctrine est basée sur l’idée erronée que l’Italie valorise moins les libertés démocratiques que la France.

La plupart des 10 personnes faisant l’objet d’une demande d’extradition rejetée par la Cour de cassation ont été dramatiquement arrêtées à leur domicile en France en avril 2021, un événement que l’Italie considère comme historique. Depuis lors, ils sont placés sous contrôle judiciaire français.

Certains d’entre eux étaient associés au groupe des Brigades rouges, qui au cours des années 1970 et 1980 ont perpétré des assassinats, des enlèvements et des « meurtres au genou », dans lesquels la cible a été touchée à la jambe.

Le tribunal a également refusé d’extrader Ciorgio Petrostefani, un militant de l’extrême gauche Lotta Continua, qui signifie la lutte continue en anglais. Il a été reconnu coupable du meurtre en 1972 du chef de la police de Milan Luigi Calabresi et condamné à 22 ans de prison.

Le chef de la police a reçu trois balles dans le dos alors qu’il se dirigeait vers sa voiture. Son assassinat a été l’un des crimes les plus médiatisés des soi-disant « années de plomb », une période où des actes de terrorisme ont été perpétrés par l’extrême droite et l’extrême gauche de sang italien.

Avant sa mort, Calabresi a mené l’interrogatoire de Giuseppe Pinelli, un anarchiste présumé, au sujet de l’attentat à la bombe de 1969 contre une banque à Milan qui a tué 17 personnes. Pinelli est mort du 4e étage de la préfecture de police, un événement qui a inspiré une pièce de théâtre et un film.

Un autre Italien autorisé par les tribunaux à rester en France est un ancien membre de la Cellule armée contre le pouvoir territorial qui a été reconnu coupable du meurtre en 1979 d’un policier carabinieri.

Adriano Sabbadin, dont le père – un boucher – a été tué en 1997, s’est dit « écœuré » par la décision de la justice française. « Que les juges nous disent : qui est coupable ? Ils ont un mort sur la conscience », a-t-il déclaré à l’agence de presse ANSA.

Le ministre italien de la justice Nordio, ancien procureur, a transmis ses pensées aux familles des victimes de « cette saison sanglante, qui a attendu des années avec tout le pays une réponse de la justice française ».

Charlotte Baudin

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