60e anniversaire des accords de paix d’Evian entre la France et l’Algérie

La signature des accords d’Evian par la France et l’Algérie le 18 mars 1962 marque la fin de près de huit années de conflit sanglant et ouvre la guerre d’indépendance de l’Algérie vis-à-vis de la France.

L’accord de paix a été signé aujourd’hui à Evian-les-Bains, il y a 60 ans, entre des représentants du gouvernement français et du gouvernement en exil du Front de libération nationale (FLN).

L’accord appelait à un cessez-le-feu immédiat et mettait fin à la bataille sanglante de huit ans pour l’indépendance de l’Algérie, du moins sur le papier.

D’âpres négociations se déroulaient en secret depuis des mois.

Ils se sont concentrés sur quatre domaines principaux : les garanties pour la pieds noirs population de colons qui voulait rester en Algérie ; la souveraineté sur le Sahara et ses champs pétrolifères ; le statut des bases militaires françaises et le droit aux essais nucléaires sur le sol algérien et le cadre régissant les futures associations entre la France et une Algérie indépendante.

La France a réussi à conserver ses droits d’extraction pétrolière et ses sites d’essais nucléaires, mais les Français sont restés profondément divisés sur la rétrocession de l’Algérie après 132 ans de régime colonial.

L’accord final a suscité la controverse des deux côtés : les extrémistes de la France métropolitaine pensaient que trop de choses avaient été remises à l’Algérie, tandis que les factions plus radicales du FLN en Algérie pensaient qu’elles avaient obtenu trop peu.

Cependant, pour le général Charles de Gaulle, c’était une victoire.

« Des mesures ont été prises pour que les gens puissent contrôler leur propre destin », a-t-il annoncé dans une allocution télévisée.

Un cessez-le-feu est signé le lendemain.

Et quelques mois plus tard, en juillet, l’Algérie devient indépendante à la suite d’un référendum.

Un demi-million de morts, voire plus

Aucun chiffre précis n’est disponible sur le nombre de personnes tuées pendant le conflit de 1954-1962, mais les historiens estiment qu’environ un demi-million de civils et de combattants, l’écrasante majorité des Algériens, sont morts.

Les autorités algériennes insistent sur le fait que le chiffre est trois fois plus élevé.

Il a fallu près de 40 ans à la France pour reconnaître officiellement que les « événements d’Afrique du Nord » constituaient en fait une guerre.

Et tandis que la France a fait des tentatives pour panser ses blessures, elle refuse toujours « de s’excuser ou de se repentir » pour 132 ans de régime colonial souvent brutal.

Exode

Quelques mois après l’indépendance, un million pied noirles colons d’origine européenne ont fui vers la France.

Ils finissent souvent par cohabiter avec des immigrés algériens. Beaucoup deviendront plus tard l’épine dorsale de l’extrême droite française.

Certains Algériens qui se sont battus pour les Français, connus sous le nom de harkisils ont été exécutés ou torturés en Algérie, mais leur nombre est très contesté.

60 000 autres se sont retrouvés dans des camps d’internement sordides en France.

Le regard des présidents sur le passé récent de la France

Valéry Giscard d’Estaing a été le premier président français à se rendre en Algérie indépendante en avril 1975.

Son successeur François Mitterrand a déclaré que « la France et l’Algérie sont capables de surmonter le traumatisme du passé » lors d’une visite en novembre 1981.

Nicolas Sarkozy a reconnu que « le système colonial était profondément injuste ».

François Hollande l’a qualifié de « brutal » et en 2016 il est devenu le premier président à marquer la fin de la guerre, provoquant l’indignation de ses opposants.

Emmanuel Macron, le premier président français né après la guerre, a exaspéré la droite en qualifiant la colonisation de l’Algérie « d’acle temps contre l’humanité« Lors de sa campagne électorale en 2017.

Il a dit qu’il était temps pour la France de « regarder notre passé en face ».

« Gestes symboliques »

Une fois président, Macron a présenté ses excuses à la veuve d’un jeune partisan français de l’indépendance algérienne, un communiste qui avait été torturé à mort par l’armée française en 1957.

Macron a également admis que l’avocat algérien Ali Boumendjel avait été torturé et tué la même année, un meurtre que les autorités françaises avaient longtemps nié.

Suite à la publication en janvier 2021 d’un rapport commandé par l’État sur la colonisation par l’historien français d’origine algérienne Benjamin Stora, Macron a déclaré que des « gestes symboliques » pourraient aider à réconcilier les deux pays.

Il a aussi supplié pardonner de harkis qui avait été « abandonné » par la France.

L’histoire « réécrite »

Mais Macron a rejeté les appels à la France pour « s’excuser ou se repentir » pour leur séjour en Algérie.

Il a déclenché une grande rupture fin 2021 après avoir accusé le « système politico-militaire… (de) réécrire totalement » l’histoire du pays après l’indépendance de l’Algérie.

Deux semaines plus tard, il a décrit le massacre de 1961 de dizaines de manifestants algériens à Paris par la police française comme « un crime impardonnable ».

En janvier 2022, il a également reconnu deux massacres de 1962 par pied noir qui se sont opposés à l’indépendance de l’Algérie par les forces françaises, ainsi que la mort de manifestants anti-guerre tués par la police parisienne la même année.

(avec AFP)

Fernand Lefèvre

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